[Tribune] Comme chaque année, l’Économie Sociale et Solidaire est à l’honneur en novembre, et c’est tant mieux ! C’est l’occasion de souligner une nouvelle fois ce paradoxe : jamais les acteurs de l’ESS n’ont été aussi indispensables à notre société et à notre avenir, et pourtant il n’a jamais été aussi impératif de les soutenir.
L’ESS est une économie vivante de près de 200 000 entreprises ou organisations, qui emploient 2,7 millions de salariés en France. Ses acteurs revêtent des formes multiples, qu’il s’agisse des associations, des mutuelles, des fondations, des coopératives ou des sociétés commerciales. Mais tous alimentent une économie à part entière, durable et juste, qui montre le chemin vers ce qui pourrait devenir demain une nouvelle norme. C’est d’ailleurs le thème choisi cette année pour la 7ème édition du Forum mondial de l’Économie Sociale et Solidaire (le GSEF), qui s’est réuni pour la première fois en France, à Bordeaux, du 29 au 31 octobre dernier : « faire de l’ESS la norme qui régulera l’économie de demain ».
Cette économie singulière, qui cherche à concilier performance économique et utilité sociale, est bien souvent LA solution, dans une société qui ne manque pas d’enjeux sociaux, environnementaux et économiques.
En se mobilisant pour remettre l’humain et la solidarité au cœur de leur modèle économique, les acteurs de l’ESS prouvent chaque jour leur efficacité et témoignent de leur capacité à relever les défis d’aujourd’hui, tels que l’inclusion, l’insertion par l’activité économique, la réduction ou valorisation des déchets, la promotion d’une économie du partage, la lutte contre le décrochage scolaire, la transition énergétique des bâtiments… Elles constituent une force d’innovation économique et sociale formidable, capable d’expérimenter et de proposer de nouvelles voies dans les territoires, aux côtés des acteurs économiques « classiques » et des pouvoirs publics.
Alors oui, l’ESS est majeure pour nous tous, aujourd’hui et demain : on ne le répètera jamais assez. Et pourtant…
Nous devons collectivement être attentifs à soutenir cette économie essentielle dans le contexte actuel, éminemment contraint et complexe. Car les signaux d’alerte se multiplient. La Cour des Comptes souligne ainsi, dans un récent rapport sur les aides à l’ESS, que ce secteur ne perçoit que 7 % des aides publiques aux entreprises, alors qu’il représente 14% de l’emploi privé.
Les financeurs de l’ESS constatent également une baisse des demandes de prêts pour investir, et à l’inverse une hausse des demandes de crédits pour consolider la trésorerie de clients confrontés à des difficultés. Et les représentants de l’ESS, dont l’UDES, alertent sur la montée des plans de licenciement ou des liquidations dans le secteur.
À ne pas suffisamment soutenir l’ESS, nous risquons non seulement d’affaiblir des acteurs porteurs de solutions innovantes, concrètes, locales, pour aujourd’hui et plus encore pour demain, partout en France, mais aussi de briser un puissant accélérateur de transition vers une économie durable et résiliente. Soutenir l’ESS, ce n’est donc pas dépenser, mais investir dans l’avenir ! Investir dans un modèle qui contribue à réduire les fractures et à créer de la cohésion sociale, en proposant des solutions innovantes.
En tant que financeur majeur de l’ESS, chez Caisse d’Epargne, nous en sommes pleinement convaincus. Soutenons alors celles et ceux qui incarnent et portent un modèle économique vertueux, réellement responsable, à la fois créateur de valeur et de solidarité.
Pierre Macé, directeur général de la Fédération nationale des Caisses d’Epargne
Sylvain Vial, directeur du développement Caisse d’Epargne


