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Le commerce équitable, un pas de géant vers le monde d’après

Quatorzaine ou Quinzaine ? Cette semaine, la bonne réponse est en seconde position. Nous sommes en effet au beau milieu de la Quinzaine du commerce équitable, qui existe depuis 20 ans et qui s’est refusée cette année à renoncer à ses festivités à cause du coronavirus. Résultat, une campagne digitale, des évènements en ligne, des témoignages sur les réseaux sociaux du 9 au 24 mai, auxquels bien sûr vous êtes invités à participer… et un dossier spécial sur Mediatico qui rassemble tout un ensemble de témoignages vidéo.

C’est important, car le commerce équitable représente un pas de géant vers le monde d’après. Dans une économie mondialisée, vous pouvez manger des fraises en novembre, ou des bananes en Norvège. Mais le coût de cette mondialisation est élevé : émissions carbone, frais d’intermédiaires, exploitation des petits producteurs, inégalités Nord-Sud, inégalités femmes-hommes… Depuis toujours, le commerce équitable combat ces inégalités. Avec des contrats signés à l’avance, à un prix jugé équitable par les coopératives de producteurs, cette négociation commerciale garantit aux exploitants un revenu minimum décent, pour qu’ils fassent vivre leur famille, qu’ils envoient leurs enfants à l’école et qu’ils investissent dans une agriculture de meilleure qualité. Bravo !

Les consommateurs applaudissent : plus de 1,5 milliard d’euros de produits équitables ont été vendus en France l’an dernier si l’on extrapole à l’ensemble de la filière les très bons chiffres du poids lourd du secteur, Max Havelaar, qui vient de faire état d’une hausse de 22% de ses ventes sur un an. Ça y est, les Français semblent avoir pris conscience que leur pouvoir d’achat peut se transformer en pouvoir d’acheter, donc d’influer sur la marche du monde. Pourtant, selon Max Havelaar, le panier moyen dépensé par les Français en produits issus du commerce équitable se monte à peine à 13,47 euros… par an ! Une goutte d’eau, dans l’immense océan de la consommation. Par méconnaissance ? Par scepticisme gustatif ? Par incompréhension ?

Alors expliquons mieux. Oui, le commerce équitable s’accommode des échanges internationaux : d’une part, parce que certains produits de base de notre alimentation quotidienne n’existent pas en France, comme le café, le cacao, les bananes. D’autre part, parce que la production locale du riz de Camargue, par exemple, serait bien insuffisante à satisfaire toute la demande française de riz. Le commerce équitable est avant tout « une alternative concrète et positive au commerce mondial dominant », explique Commerce Equitable France, qui fédère les acteurs du secteur, car « la concentration des richesses dans les mains de quelques-uns se fait aux dépens des droits humains, de la préservation de l’environnement et de risques sanitaires importants ».

Oui ensuite, le commerce équitable peut être local et bio. Mais pas nécessairement. Pour éviter les confusions, acceptons que ce qui est produit localement n’est pas forcément bio ni équitable, et que l’agriculture biologique n’est pas toujours franco-française ni respectueuse des travailleurs. Pour autant, le bio français se porte bien. Et les filières françaises de commerce équitable sont reconnues depuis la loi de 2014 sur l’Economie sociale et Solidaire. Donc si vous accordez du pouvoir à votre consommation, faites confiance aux labels officiels du commerce équitable, ainsi qu’aux produits qui portent plusieurs de ces labels bien connus sur l’étiquette.

Enfin oui, le commerce équitable aide à lutter contre le réchauffement climatique. Le GIEC nous alertait en 2018 sur le fait que l’agriculture et l’alimentation comptent pour 24% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Or, dans les filières du commerce équitable, le juste prix payé aux producteurs leur permet d’honorer un engagement fort : celui de réinvestir une part de leurs gains dans la transition agro-écologique. Même en France, la sécurité économique du commerce équitable a permis d’accélérer les conversions de fermes en bio, rappelle Commerce Equitable France.

C’est donc bien au monde d’après que nous invite le commerce équitable. Un monde plus respectueux des travailleurs, plus soucieux de l’environnement, en phase avec les aspirations des consommateurs, garant d’une meilleure résilience économique. La voie est tracée, il nous revient de l’emprunter. Et aux décideurs publics de modifier les règles du commerce conventionnel pour que le commerce équitable devienne la norme. Pas seulement durant cette Quinzaine, qui sert de piqûre de rappel. Mais tout au long de l’année : soyez-en certains, le pouvoir est dans votre carte bancaire.

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