ESS ON AIR

David Cluzeau (UDES, Hexopée) : « L’ESS partage l’exaspération et la lassitude des Français »

À l’occasion de la rentrée politique et associative, Mediatico reçoit cette semaine David Cluzeau, président de l’Union des employeurs de l’ESS (UDES) et délégué général d’Hexopée, le syndicat professionnel des secteurs de l’animation, du sport, du tourisme social et de l’éducation populaire. Entre inquiétudes budgétaires et mobilisation des acteurs, il dresse, sur le plateau de notre émission « ESS On Air », un constat préoccupant de la situation économique et sociale des associations à la sortie de l’été (voir la vidéo intégrale ci-dessous, accès réservé aux abonnés).

Le projet de loi de finances 2026 présenté cet été, qui devrait faire tomber le gouvernement Bayrou dès la semaine prochaine, fait peser de lourdes menaces sur les structures de l’économie sociale et solidaire, en particulier sur les associations. « Les arbitrages impactent très négativement nos employeurs », alerte David Cluzeau sur notre plateau.

Un secteur « essoufflé » après l’été

De nombreux acteurs associatifs ressortent de l’été particulièrement fragilisés, notamment dans l’animation et le tourisme social. « Nous constatons une baisse d’activité d’environ 10 % dans les colonies de vacances », indique David Cluzeau, évoquant un « moral au plus bas » après la remise en cause du Pass culture et du Pass colo. La rentrée 2025 ressemble ainsi étrangement à celle de 2024 : « C’est un peu comme dans le film Un jour sans fin. Les inquiétudes se répètent. »

S’il ne soutient pas l’appel à « tout bloquer » le 10 septembre prochain en raison de sa posture de représentant des employeurs, il reconnaît néanmoins une « exaspération, une incompréhension et une grande lassitude » chez les Français et dans les structures associatives. Selon lui, « si ces réactions surgissent, c’est bien qu’il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans notre société ». Quant à l’appel à la grève du 18 septembre, il rappelle que cette initiative émane des syndicats de salariés et ne le soutient pas non plus, mais il admet que la question de rendre visible l’ESS par son absence reste un sujet récurrent.

Hexopée : représenter et négocier

Dans notre séquence « Le pitch en 90 secondes », David Cluzeau rappelle qu’Hexopée rassemble 14.000 entreprises de l’ESS, employant plus de 100.000 salariés en France. Son rôle : représenter et défendre les employeurs dans les champs de l’éducation populaire, du sport, du tourisme social et de l’hébergement des jeunes. « Nous produisons du droit, nous négocions les conditions de travail et nous faisons évoluer les législations », résume David Cluzeau. Un travail à mi-chemin entre syndicalisme et lobbying : « Je défends et je convaincs. »

Mais pour l’UDES, comme pour Hexopée, la rentrée 2025 est placée sous le signe de l’incertitude. Entre restrictions budgétaires, baisse d’activité et inquiétudes sociales, les employeurs de l’ESS avancent avec prudence. « Nous sommes face à un mur dont nous ne connaissons pas la hauteur », affirme David Cluzeau, appelant les pouvoirs publics à mieux soutenir des secteurs essentiels à la cohésion sociale.

François Bayrou « dilapide les crédits de la démocratie » 

Dans notre séquence photo « Face à Face », David Cluzeau s’adresse d’abord à François Bayrou : il l’appelle à « arrêter de dilapider les crédits de la démocratie » par des décisions budgétaires incertaines. Commentaire direct, sans détour.

Face à la coupure de presse du Midi Libre où l’économiste Éric Heyer (OFCE) affirme que « la France n’est pas au bord de la faillite », David Cluzeau salue ce « contrepoint essentiel » dans le débat budgétaire actuel : « Nous avons besoin en permanence de débats contradictoires pour construire une opinion éclairée » et l’ESS, estime-t-il, ne peut avancer qu’adossée à des diagnostics économiques fiables.

Enfin, devant la photo de Maud Sarda, directrice générale de Label Emmaüs, posant face à l’objectif pour la rentrée scolaire sur une pile de livres d’occasion, il se dit admiratif : « Elle incarne ce que doit être l’ESS : innovation, action, évaluation, capacité tester et à recommencer. » Pour David Cluzeau, la démarche circulaire et inclusive de Label Emmaüs illustre parfaitement l’avenir du secteur.

L’ESS : Incontournable, Inclusive et Inspirante

Enfin, pour résumer l’avenir de l’économie sociale et solidaire en trois mots, David Cluzeau choisit les termes : incontournable, inclusive et inspirante. Certes, l’incertitude empêche les acteurs de se projeter et leur fragilisation fait peser des menaces sur la démocratie elle-même, car, sans elle, pas de projet collectif possible.

Mais ce qui l’enthousiasme, c’est la force citoyenne du secteur : « L’ESS est l’un des rares espaces où chacun peut être acteur de son émancipation et du développement collectif. » Associations, coopératives, mutuelles, entrepreneuriat social : l’économie sociale et solidaire invente déjà les modèles économiques et sociaux de demain, affirme-t-il.

Il invite donc les jeunes à oser se tourner vers l’ESS : « Oser franchir le pas, aller chercher du sens, garder sa capacité à s’indigner et à construire, pierre après pierre, un édifice collectif en mouvement ». Un message qui sonne comme un appel à la relève !

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