Alors que le gouvernement Lecornu peine à trouver ses marques et que le budget 2026 annonce de nouvelles coupes dans les dépenses publiques, l’économie sociale et solidaire (ESS) se trouve une fois de plus en première ligne. Associations, coopératives, mutuelles, fondations et sociétés commerciales de l’ESS alertent sur leur fragilité face aux décisions budgétaires, alors que leurs missions sociales ne cessent de s’élargir face à la montée des besoins.
Invité de la nouvelle formule de « ESS On Air », l’émission de Mediatico qui décrypte l’actualité « du point de vue de l’ESS » (à retrouver en intégralité ci-dessous), Benoît Hamon a rappelé l’ambition qu’il porte aujourd’hui à la tête d’ESS France, l’organisation représentative de toutes les familles de l’économie sociale et solidaire : augmenter de 20 % les emplois dans l’ESS d’ici trois ans et doubler la part de l’ESS dans l’économie française d’ici 2050.
Ces objectifs chiffrés sont au coeur du document de rentrée que vient de publier ESS France, à savoir sa « contribution à la Stratégie nationale pour le développement de l’ESS » que le gouvernement français doit désormais transmettre à Bruxelles d’ici à la fin de l’année.
Dans ce document copieux, adopté à l’unanimité par toutes les familles de l’ESS, ESS France propose aussi que l’État réserve aux acteurs de l’ESS certains secteurs d’activité économique, comme la petite enfance ou le grand âge, afin de protéger les services essentiels de la logique financière.
L’Actu qui pique : la place de l’ESS dans le gouvernement Lecornu
Interrogé sur les premières orientations du nouveau Premier ministre, Benoît Hamon attend « un signal fort » du discours de politique générale que Sébastien Lecornu prononcera prochainement à l’Assemblée nationale. Avoir un interlocuteur à Bercy ne suffit pas si Bercy continue de fermer les robinets, a souligné Benoît Hamon, appelant à un soutien budgétaire clair et assumé.
La Boîte à solutions : financer l’ESS malgré l’austérité
Alors que l’État cherche à faire plusieurs milliards d’économies, Benoît Hamon insiste : l’ESS ne doit pas faire les frais des restrictions budgétaires, car elle est une solution en soi face aux difficultés croissantes des Françaises et des Français. En soutenant l’insertion par l’activité économique, l’éducation populaire ou l’accueil des migrants, les associations réduisent les fractures sociales, territoriales et générationnelles. Interrogé plus directement sur les conséquences des coupes budgétaires pour l’association Singa qu’il dirige, Benoît Hamon s’est exprimé sans détour sur les suppressions d’emploi qu’il ne pourra pas éviter.
La Question qui fâche : la « Loi Hamon » a-t-elle échoué ?
Dans notre émission, nous sommes également revenus sur le bilan en demi-teinte que vient de dresser la Cour des Comptes, dix ans après sa loi de 2014 sur l’ESS. Le quotidien “Le Monde” a titré sur l’« échec » de cette loi à faire changer d’échelle le secteur. Benoît Hamon assume : « Si l’ESS n’a pas grandi comme elle le devrait, c’est moins la faute d’une loi que celle d’un manque de volonté politique. » Et de réaffirmer : « Oui, l’ESS peut devenir mainstream, si on s’en donne les moyens. »
Face à face : Sarkozy, Stérin, Haenel
Dans une séquence plus directe, Benoît Hamon a réagi aux photos-surprise que nous avions préparées : celle de Nicolas Sarkozy, condamné à cinq ans de prison ferme pour association de malfaiteurs dans le cadre du financement illégal sur fonds lybiens de sa campagne présidentielle de 2007 ;
puis les polémiques relayées par la presse régionale que suscite la Nuit du Bien Commun, financée par le milliardaire Pierre-Edouard Stérin qui ne cache pas son soutien à l’extrême-droite, et que Benoît Hamon qualifie de « méchant en carton » ;
et enfin l’engagement de l’actrice Adèle Haenel dans la flotille humanitaire en route pour Gaza, arraisonnée juste après l’enregistrement de notre émission par l’armée israélienne . Trois regards croisés, qui disent beaucoup des combats actuels de Benoît Hamon.
Le Monde de demain : doubler la part de l’ESS
Dans notre dernière séquence « Le Monde de demain », Benoit Hamon a retenu deux mots pour qualifier l’avenir de l’ESS : « radieux » en théorie, car tout appelle l’ESS ; « sinistre » quand on regarde les budgets « car les choix faits aujourd’hui sacrifient l’unité nationale », a-t-il résumé.
Malgré les difficultés du moment, Benoît Hamon s’est néanmoins affiché optimiste pour l’avenir. Misant sur les forces citoyennes pour préserver notre modèle de société, il a d’abord appelé à une forte mobilisation le 11 octobre prochain de toutes celles et ceux qui travaillent ou qui utilisent les services rendus par les associations, appuyant ainsi l’appel lancé par le Mouvement Associatif. Outre les multiples initiatives que prendront les associations françaises, un rendez-vous national est d’ores et déjà fixé à Paris, place de la République, le 11 octobre à 14h.
Par ailleurs, Benoît Hamon a rappelé qu’ESS France propose désormais cinq priorités pour transformer l’économie à horizon 2050 :
- réserver certains secteurs de l’économie aux acteurs de l’ESS,
- faciliter la reprise d’entreprises par leurs salariés sous forme coopérative,
- réformer la taxe sur les salaires des associations,
- mieux accompagner les projets à toutes les étapes de leur maturité,
- renforcer les coopérations territoriales.
Benoît Hamon voit là une « révolution douce », capable de donner à la France une économie plus résiliente, plus protectrice et plus juste.
L’ensemble des propositions sont disponibles dans la « contribution d’ESS France à la Stratégie nationale pour le développement de l’économie sociale et solidaire ». Nous verrons fin novembre si le gouvernement Lecornu reprendra ce propositions en tout ou en partie, lorsqu’il adressera sa feuille de route à la Commission de Bruxelles.
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L’émission complète avec Benoît Hamon :


