« Le commerce équitable, des valeurs qui nous rapprochent ! », clame cette année la campagne de Commerce Équitable France, qui organise la Quinzaine du commerce équitable du 7 au 22 mai 2022. Quelles valeurs, selon vous ? La solidarité à l’égard des petits producteurs de l’autre bout du monde qui veulent vivre du juste prix de leur travail ; l’achat à prix garanti d’avance pour les aider à se prémunir d’une mauvaise saison climatique ; le moindre nombre d’intermédiaires dans le circuit de distribution car le circuit court réduit les frais inutiles et humanise la relation producteur-consommateur. Oui, nous avons des valeurs à partager.
La notion de « local » est à l’évidence centrale dans le commerce équitable, relevait en novembre dernier François Collart Dutilleul, professeur émérite et membre honoraire de l’Institut Universitaire de France, lors des dernières Assises nationales du commerce équitable (lire notre article). Spécialiste à la fois du droit de l’alimentation et du droit à la sécurité alimentaire, souligne que le modèle de l’offre et la demande de l’économie classique a le défaut d’exclure toute logique géographique. Alors que le commerce équitable, au contraire, permet « d’intégrer la géographie en intégrant les territoires » au concept d’échange.
« Il faut intégrer la géographie en intégrant les territoires »
François Collart Dutilleul a publié en 2021 l’ouvrage Nourrir, Quand la démocratie alimentaire passe à table, aux éditions Les Liens qui libèrent. Dans un récent article publié dans la Recma, revue internationale de l’économie sociale, il précise : « C’est au fond la différence essentielle qui distingue une loi d’ajustement des offres et des demandes d’une loi d’ajustement des ressources et des besoins, ce qu’on réalise en passant du droit “de” l’alimentation au droit “à” l’alimentation ».
Le « local de solidarité » du commerce équitable
Connaître la provenance d’un produit est une condition indispensable à « des choix alimentaires raisonnés, individuels et collectifs », estime-t-il. Le raisonnement « local » pour les cantines n’est pas le même que celui des contrats « bio, locaux et équitables » qui se répandent mais dont la logique n’est souvent pas compatible avec le dérèglement climatique planétaire.
Pour autant, « il ne faut pas s’enfermer dans le local, qui est une dimension plurielle (…) Il y a mon local politique, administratif mais aussi mon local de solidarité ». Ainsi, lui se sent solidaire de pays hors de l’Union européenne, au regard notamment de l’accaparement des terres. « Les pays riches, dont je fais partie, ont une responsabilité forte en la matière. Le Mali ou la Côte-d’Ivoire deviennent mon local de solidarité ».