Les acteurs de l’économie sociale et solidaire sont salués pour être en première ligne face à la crise sociale, économique et sanitaire. Ils créent des emplois locaux, non délocalisables. Ils innovent au cœur des territoires, en s’efforçant de répondre à des besoins non pourvus jusqu’ici. Ils prônent la coopération et la gouvernance démocratique pour être toujours plus utiles et développer leur modèle économique. Ils pèsent 10% du PIB et 14% de l’emploi privé. Dans certains secteurs d’activité, ils tirent leur épingle du jeu malgré le coronavirus, faisant preuve d’agilité et de résilience, souvent grâce au numérique. Mais dans l’animation, la culture, le sport, le tourisme durable ou la restauration associative, d’autres souffrent particulièrement de cette crise. Et trop souvent en silence.
Alors que 30.000 associations en France redoutent un dépôt de bilan d’ici au printemps et que 55.000 d’entre elles craignent de ne pas pouvoir maintenir tous leurs emplois, Olivia Grégoire, Secrétaire d’État à l’Économie sociale, solidaire et responsable, redouble d’efforts pour leur venir en aide. Disons-le tout net, elle fait le job. Elle lance la série vidéo « Commun Impact » pour valoriser les acteurs de l’ESS. Elle secoue le cocotier à Bercy. Elle va sur le terrain. Elle arpente aussi les plateaux télévisés. Sa parole est ferme, quitte à surprendre : au moins, les messages sont clairs. Assurément, elle porte aussi une vision : « Cette crise appelle à transformer notre économie vers un modèle plus durable et inclusif, c’est l’essence du plan de relance qui sera déployé en 2021 », affirmait-elle début novembre, à l’ouverture du Mois de l’ESS. Mais en attendant 2021, c’est maintenant que les structures de l’ESS ont besoin de soutien.
Rattachée à Bercy, Olivia Grégoire relève que, sur 160.000 associations employeuses en France, seules 15.000 ont bénéficié du fonds de solidarité, soit moins de 10% d’entre elles. Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, le gouvernement a donc déposé un amendement, voté mardi dernier par l’Assemblée nationale, pour créer un fonds d’urgence baptisé « UrgencESS ». Un budget de crise pour l’ESS, doté de 30 millions d’euros, pris sur le fonds de solidarité existant, mais spécifiquement fléché vers les associations, les coopératives, les entrepreneurs sociaux et les structures de l’ESS qui emploient moins de 10 salariés. Objectif : proposer une aide de 5.000 à 8.000 euros par structure, pour les aider à poursuivre leur activité, à financer les emplois et à répondre aux problèmes immédiats de trésorerie. Un fonds qui ne sera toutefois opérationnel que début 2021, le temps de trouver l’organisme public porteur du dispositif. Deux mois de patience… c’est court et long à la fois.
Pour autant, Olivia Grégoire fait-elle assez ? Elle a mis en place un guide de 20 pages, disponible sur internet, pour recenser tous les dispositifs d’appui accessibles à l’ESS pour affronter la crise. Elle a instauré une adresse e-mail unique pour répondre aux questions des acteurs de l’ESS sur ces dispositifs d’aide : infocovid.ess@cabinets.finances.gouv.fr. Elle a mis aussi – un peu – la pression sur les banques, en leur demandant « de relayer » les informations sur les dispositifs publics en place et d’être « bienveillantes avec ces structures de l’ESS qui seraient en difficulté passagère ». Elle a également saisi le médiateur du crédit, pour que les acteurs de l’ESS aient un interlocuteur dans chaque succursale départementale de la Banque de France s’ils rencontrent des difficultés avec leur banque. Enfin, Bercy dispose d’un numéro vert ouvert à tous les acteurs économiques, dont ceux de l’ESS : le 0806 000 245. Peut-elle aller encore plus loin ?
Certains réseaux de l’économie sociale et solidaire lui demandent davantage. La création d’un fonds d’investissement de 1 milliard d’euros dédié à l’ESS et piloté par la Caisse des dépôts. Une TVA à taux réduit pour l’ESS. La mise en place d’un crédit d’impôt à l’innovation sociale pour encourager la recherche dans nos secteurs. Une prolongation de l’activité partielle de longue durée au-delà du 31 décembre pour le tourisme, la culture, l’éducation populaire ou le sport, ainsi que la suppression des charges sociales et fiscales pour ces secteurs jusqu’en juin 2021. L’embauche de jeunes pour des projets d’utilité sociale et écologique, via le budget sous-utilisé des Parcours emploi compétences (PEC) et des Contrats Initiative Emploi (CIE). Ou encore l’élargissement de la Semaine de la finance solidaire à une campagne promotionnelle qui durerait toute l’année, pour que donner du sens à son argent devienne enfin la norme.
Quelles demandes Olivia Grégoire décidera-t-elle de soutenir ? Quelle est sa feuille de route pour l’ESS ? Quelle part l’économie à impact occupera-t-elle dans le budget 2021 ?
Olivia Grégoire est notre invitée dans IMPACT #23 : posez-lui vos questions !