Denis Philippe, président de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, exclut d’être l’interlocuteur de la région PACA si celle-ci tombe aux mains du Rassemblement National
Exclusif ! A deux semaines des élections régionales, haro du monde de l’ESS contre le Rassemblement National en région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Dans cette. interview exclusive à Mediatico, le président de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (CRESS PACA), Denis Philippe, exprime sans détours son « inquiétude » et ne mâche pas ses mots : « On ne va pas se mentir, le duel va être entre le RN et la liste conduite par le président sortant, Renaud Muselier. Si l’économie sociale et solidaire défend les valeurs républicaines, je ne peux pas imaginer être demain l’interlocuteur du Rassemblement National« , affirme-t-il.
Comment réagira l’ESS en PACA si le RN l’emporte, puisque le parti d’extrême-droite semble en mesure de l’emporter face à la liste Les Républicains au second tour des élections régionales des 20 et 27 juin prochains ? « Si cela devait malheureusement se produire, je convoquerai immédiatement une réunion du conseil d’administration de la Chambre régionale de l’ESS, je proposerai de ne pas avoir de relation avec cette région, je saisirai l’Etat, je trouverai de nouveaux partenariats, mais j’estime que l’ESS ne peut pas entrer en relation avec le Rassemblement National« , tonne Denis Philippe. « Si par malheur le RN devait être élu, nous aurons une décision importante à prendre« .
Difficile en effet de naviguer en eaux troubles. Le rôle d’une Chambre régionale de l’ESS est d’être l’interlocuteur des institutions régionales, à commencer par le Conseil régional qui porte dans ses attributions le développement économique de la région. « Certains administrateurs de la CRESS PACA me le diront sans doute, reprend Denis Philippe. Mais il faut savoir dire stop. Si nos valeurs sont de défendre les valeurs républicaines et que l’on me demande de discuter avec le RN, je ne serai plus le président de cette chambre régionale. Je démissionnerai, car je pense que c’est contraire aux valeurs que nous portons« .
Depuis toujours, l’économie sociale et solidaire se montre en effet attachée aux valeurs républicaines. Liberté, égalité, fraternité… donc solidarité, mixité culturelle et sociale, cohésion nationale. « L’arrivée du RN ne peut pas nous enchanter, poursuit Denis Philippe, l’ESS est très attachée aux valeurs de la République et c’est d’ailleurs le sens de la démarche de la ‘République de l’ESS’ que porte actuellement ESS France« , l’organisme qui fédère les acteurs de l’économie sociale et solidaire sur le territoire national, rappelle-t-il.
Pour autant, l’exécutif régional sortant présidé par Renaud Muselier (LR) a-t-il été exemplaire envers l’ESS ? Sûrement pas. « En tant que président de CRESS, je sais ce que nous avons fait, même si cela n’a pas toujours été simple (…) Mais pendant la crise du Covid, nous avons été associés à toute les réunions avec les autres acteurs économiques et nous avons créé un fonds spécifique, ESSor« , pour aider les acteurs de l’ESS à traverser la crise.
En 2015 déjà, le Front National avait fait trembler les partis républicains. Mais le jeu politique était alors encore relativement classique : les paris politiques traditionnels n’avaient pas éclaté comme aujourd’hui et les acteurs de l’ESS n’avaient pas pris position au premier tour des élections régionales. Au second tour seulement, ils s’étaient exprimés pour faire barrage à Marion Maréchal Le Pen.
Mais aujourd’hui, le jeu est beaucoup plus troublé, renforçant les chances du Rassemblement National de l’emporter. En région PACA, mais pas seulement : les Hauts-de-France son également scrutés de près par les analystes politiques et les instituts de sondage. Une situation inédite en France à l’échelon politique régional. Et cela, à un an de l’élection présidentielle !