Une étude réalisée par l’IFOP pour le collectif L’Ascenseur, publiée en décembre dernier, dresse un tableau alarmant des inégalités ressenties par les jeunes Français âgés de 12 à 30 ans. Ce baromètre met en évidence des fractures sociales et territoriales profondes qui continuent de peser sur une génération en quête de justice sociale et d’opportunités. Les résultats révèlent une perception d’injustice, des difficultés d’orientation, mais aussi des réussites masquant des problèmes structurels. Retour sur les principaux enseignements de ce Baromètre de l’égalité des chances :
Une jeunesse sensibilisée aux inégalités de genre
À l’instar du reste de la population, 68 % des jeunes considèrent que la société française est injuste. Mais leur sensibilité aux inégalités de genre est particulièrement marquée : près de la moitié d’entre eux (49 %) les identifient comme une injustice majeure, contre 36 % pour l’ensemble des Français. Les inégalités salariales (54 %) et celles liées à l’emploi (31 %) apparaissent également parmi leurs priorités. Cette perception est encore plus prononcée chez les femmes (73 %) et les jeunes résidant dans les quartiers prioritaires de la ville (69 %), traduisant des fractures sociales et territoriales qui amplifient ce sentiment d’injustice.
L’orientation scolaire : un parcours semé de regrets
Le système d’orientation français fait l’objet de critiques récurrentes de la part des jeunes. Plus d’un tiers (35 %) déclare ne pas avoir été suffisamment accompagné dans le choix de son parcours scolaire ou professionnel. Cette lacune se traduit par des regrets : 42 % des actifs et demandeurs d’emploi estiment qu’ils auraient choisi différemment s’ils avaient bénéficié de meilleures informations. Les jeunes issus des catégories populaires sont encore plus touchés, avec un taux qui dépasse 50 %. De plus, 40 % des élèves et étudiants affirment avoir des difficultés à se projeter dans leur avenir, révélant un manque de repères et de soutien.
Un décalage entre appréhensions et insertion professionnelle
Si les jeunes appréhendent massivement leur avenir professionnel (78 % des collégiens, lycéens et étudiants), leur réalité semble plus encourageante : 75 % des actifs jugent leur insertion professionnelle satisfaisante. Ce paradoxe pourrait s’expliquer par l’amélioration du marché de l’emploi. Cependant, cette apparente réussite cache des pratiques problématiques : un tiers des jeunes actifs a déjà modifié volontairement des informations sur son CV, une proportion atteignant 48 % dans les quartiers prioritaires. Cela témoigne d’une pression à la conformité et d’un sentiment d’inégalité face aux opportunités.
Des fractures territoriales dans l’accès à la culture et au sport
L’accès aux activités culturelles et sportives est un autre domaine où les inégalités territoriales se manifestent. Les jeunes des grandes villes, notamment Paris (67 %), bénéficient d’une meilleure accessibilité que ceux des zones rurales (44 %). Le cinéma, jugé accessible par 82 % des jeunes, contraste avec le théâtre, perçu comme tel par seulement 58 %. Les inégalités touchent également les équipements sportifs, freinant la pratique régulière d’activités chez les jeunes issus des zones rurales et défavorisées.
Discriminations et sentiment d’exclusion
Enfin, l’étude révèle que 39 % des jeunes ressentent des inégalités de traitement dans leurs pratiques culturelles, un chiffre qui grimpe à 48 % chez les catégories populaires et à 47 % dans les quartiers prioritaires. Les raisons invoquées incluent un manque de diversité dans les programmations et des stéréotypes persistants. Ces discriminations se retrouvent également dans le domaine sportif et professionnel, affectant particulièrement les jeunes les plus fragiles.
Une urgence : renforcer l’égalité des chances
Les conclusions de ce baromètre appellent à une action rapide et coordonnée pour réduire ces inégalités. Qu’il s’agisse d’améliorer l’orientation, de renforcer l’accès à la culture ou de combattre les discriminations, les jeunes Français expriment un besoin criant de justice sociale. Face à ces fractures, il appartient aux décideurs publics et aux acteurs de terrain de bâtir un avenir où chacun pourra pleinement développer son potentiel, quel que soit son milieu d’origine ou son lieu de vie.