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Journée mondiale de l’alimentation : les solutions de l’ESS pour un système alimentaire juste et durable

En cette Journée mondiale de l’alimentation, Mediatico fait le point sur les solutions qu’offre l’économie sociale et solidaire pour lutter contre les inégalités d’accès à une nourriture saine et durable. 

Partout sur le territoire, en effet, les acteurs de l’ESS portent des solutions concrètes pour refonder notre modèle agricole et alimentaire. À l’heure où 8 millions de Français vivent en insécurité alimentaire, où les étudiants sautent des repas faute d’argent, et où le modèle productiviste montre ses limites écologiques, cela méritait d’en parler !

La précarité alimentaire, un symptôme social durable

La précarité étudiante ne se résume plus à une crise ponctuelle : elle est désormais structurelle et façonne les trajectoires de toute une génération. Le dernier baromètre Cop1 / IFOP 2025 sur la précarité étudiante dresse un constat alarmant :

  • Deux étudiant·es sur trois ont déjà sauté un repas faute d’argent.
  • 16 % ont eu recours à l’aide alimentaire.
  • 49 % disposent de moins de 100 € par mois une fois le loyer payé.

Pour Cop1, association de solidarité étudiante, la réponse doit dépasser l’action caritative : « Les solutions ne peuvent pas reposer uniquement sur les associations. Il faut une politique publique ambitieuse, construite avec et pour les étudiant·es », plaide-t-elle. Cette revendication rejoint une préoccupation plus large : comment garantir à tous, et notamment aux plus jeunes, un droit effectif à une alimentation digne ?

L’ESS, moteur d’une alimentation durable et solidaire

ESS France, la chambre représentative du secteur, rappelle que les structures de l’économie sociale et solidaire innovent à chaque maillon de la chaîne alimentaire : de la production à la distribution, de la formation à la restauration collective, en passant par la gestion des déchets et l’éducation populaire.

  • Des réseaux coopératifs comme la Fédération nationale des CUMA, les CIVAM ou la FNAB accompagnent la transition agroécologique des exploitations. 
  • Des associations telles que Kokopelli défendent les semences libres et reproductibles, tandis que le Réseau Haies France réhabilite les arbres dans les champs pour restaurer la biodiversité. 
  • Les coopératives Atelier Paysan ou Filière Locale Bio 56 soutiennent la création d’outils low-tech et la sécurisation des débouchés des producteurs.

Face au coût important de l’accès au foncier, qui constitue l’un des plus grands freins à l’installation agricole, des acteurs comme Terre de Liens, la Foncière solidaire ou encore FEVE (Fermes en Vie) mobilisent aussi l’épargne citoyenne pour acheter des terres agricoles et les mettre à disposition de nouveaux agriculteurs, à condition de pratiquer une agriculture paysanne et biologique. D’autres, comme Les Fermes partagées, expérimentent le modèle des fermes collectives pour mutualiser les risques, diversifier les productions et redonner de l’attractivité au métier.

Relocaliser et coopérer

Pour constituer et consolider les filières alimentaires, les Projets alimentaires territoriaux (PAT) et les pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) jouent un rôle clé, en particulier dans la relocalisation. Le Réseau Manger Bio, par exemple, structure des filières biologiques locales destinées à la restauration collective tout en soutenant la loi Egalim (20 % de produits bio dans les cantines publiques).

Dans la transformation alimentaire et la logistique, des abattoirs ou des conserveries coopératives (comme la SCIC Rostrenen) permettent aux agriculteurs de maîtriser toute la chaîne de valeur. 

En matière d’emploi, les Jardins de Cocagne, Les Paniers de la Mer ou encore Emmaüs Agricole démontrent aussi que l’alimentation peut être un support d’insertion professionnelle, tout en luttant contre la précarité alimentaire via des programmes de paniers solidaires.

ESS France rappelle que 55 % des déterminants de santé dépendent de conditions socio-économiques, qui incluent l’alimentation. Garantir une nourriture saine, locale et accessible, permet donc d’agir à la fois pour la santé, la justice sociale et la transition écologique. Un soutien politique fort est indispensable pour faire de ces initiatives locales des piliers d’un autre modèle alimentaire.

Alter Kapitae : repenser la souveraineté alimentaire

Pour sa part, l’association Alter Kapitae publie une proposition ambitieuse pour une « politique agricole et alimentaire décroissante » face à la dérive du modèle agro-industriel et à la signature controversée du traité Mercosur. 

Son diagnostic est sans détour : la France, première puissance agricole européenne, produit pour exporter mais reste dépendante des importations pour se nourrir. Pendant ce temps, les agriculteurs, sous-payés et endettés, quittent massivement la profession.

Alter Kapitae plaide pour une réappropriation démocratique de la politique agricole, fondée sur une agriculture nourricière, respectueuse des sols et de la biodiversité. Ses 20 mesures phares, qui seront présentées le 22 novembre lors de l’Agora de la Décroissance prospère, à l’Académie du Climat à Paris, visent à articuler décroissance, justice sociale et démocratie alimentaire. Une orientation politique qui résonne fortement avec les valeurs de l’ESS : remettre l’économie au service du vivant.

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