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Pour un réarmement de nos services publics

Plus que deux jours avant la décision du Conseil constitutionnel. Trois fois hélas, celui-ci ne censurera pas la loi Immigration, tout au plus lui censurera-t-il quelques articles. Mais cette loi française, votée tout à la fois dans l’idéologie et avec les voix du Rassemblement National, s’appliquera. Une loi de la honte, qui renonce au droit du sol, à l’accueil humaniste et aux trois valeurs de notre devise républicaine. Une loi qui préfère les quotas, les délits, la répression et la préférence nationale, que ne peuvent pas accepter les acteurs de l’ESS. 

Je goûte assez peu d’habitude la comparaison France-Allemagne, mais celle-ci m’a parue ce week-end très instructive. Voyez seulement : 15.000 manifestants dimanche à Paris et 150.000 dans toute la France. Contre 1,5 million d’Allemands descendus dans les rues depuis vendredi, soit dix fois plus, pour manifester contre le parti d’extrême droite AFD et son projet d’expulsion massive de personnes étrangères ou d’origine étrangère.

Travail, Famille, Patrie

Que cela nous dit-il de l’atonie des Français ? Partent-ils déjà battus face à l’extrême-droite, espérant secrètement que le chef de l’Etat et son Premier ministre soient les meilleurs barrages face au RN ? Ou sont-ils à ce point assommés par la novlangue et les opérations communication de l’exécutif ? 

Emmanuel Macron pourrait tout à fait ne pas promulguer la loi Immigration, mais je prends le pari qu’il la promulguera, pour raisons politiques. Car après son opération de communication-séduction à la télévision, la semaine dernière, m’est venu le temps de l’analyse. Je fais ici un autre parallèle dont je suis presque honteux, mais qui m’apparaît tel le nez au milieu de la figure : avez-vous remarqué comme son triptyque « Plein emploi – Réarmement démographique – Réarmement civique » fait écho à cet autre slogan, « Travail – Famille – Patrie », venu d’une autre France et d’un autre temps ? J’en suis vraiment gêné. J’espère tant me tromper !

Assurément, il nous faut un réarmement, oui ! Mais pas n’importe lequel, et d’ailleurs pourquoi donc toujours user de ce vocabulaire guerrier ? « Laisse mon utérus tranquille », répondent les jeunes femmes sur les réseaux sociaux, après le slogan macronien d’un réarmement démographique. « Remettez d’abord des profs à l’école publique », réagissent les autres après sa volonté d’un réarmement civique de la jeunesse. Certes ! Et si l’on commençait par réparer ce qui a été cassé depuis 20 ans ?

Réarmer nos services publics et notre devise nationale

Ce qu’il nous faut, c’est un réarmement des services publics, pour que les quartiers, les campagnes et les zones excentrées ne se soient plus les reléguées de la République. Des urgences médicales à l’éducation nationale. Du service postal à l’administration fiscale.

Ce qu’il nous faut, c’est un réarmement de la politique au sens propre, ré-inversant le calendrier électoral qu’avait défait Nicolas Sarkozy pour que tous les pouvoirs ne soient plus aux mains d’un même homme et en redonnant une vision d’avenir aux Français pour qu’ils se projettent vers un horizon désirable, plutôt que détestable.

Ce qu’il nous faut, enfin, c’est un réarmement de notre devise nationale, « liberté, égalité, fraternité ». Elle s’accompagne si bien des valeurs de l’économie sociale et solidaire que nous pourrions la traduire autrement et écrire : « émancipation, justice sociale, solidarité ». Sur le fronton de nos écoles. Et de toutes nos associations. C’est la meilleure antidote au Rassemblement National, qui n’a de rassembleur que le nom.


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