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Convention Citoyenne pour le Climat : un triple succès, à confirmer par les actes

150 citoyens tirés au sort, 9 mois de réflexion, 149 solutions : voilà résumée en trois chiffres le bilan de notre Convention Citoyenne pour le Climat, qui fera date, espérons-le. Vouée à « lutter contre le réchauffement climatique » et à réduire de 40 % nos émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, cette convention se clôture sur au moins trois succès évidents – malgré les critiques, inévitables –sur le plan démocratique, écologique et politique.

Succès démocratique d’abord. Car la France vient de découvrir qu’une assemblée citoyenne tirée au sort, au nombre limité donc a priori peu légitime, est tout à fait capable d’émettre des propositions sérieuses, mûries et débattues, à l’attention du personnel politique. C’est bien la preuve que notre démocratie représentative peut se réinventer, en s’appuyant sur une démocratie délibérative animée par ses citoyens. C’est ce que prônent sans relâche les acteurs de l’économie sociale et solidaire, toujours en prise avec les territoires. C’est aussi ce que réclame le mouvement pacifique Extinction Rébellion, qui voit dans ces assemblées citoyennes un instrument de contournement des sempiternels blocages politiques.

Succès écologique ensuite, car l’ensemble des mesures proposées fait figure de rouleau compresseur écologique. Un quasi-programme, applaudi d’ailleurs à 100% par EELV, qui couvre aussi bien le logement que l’alimentation, l’énergie et les transports, mais aussi notre production et notre consommation. Retenons d’abord quelques idées faciles : interdire de chauffer les terrasses extérieures des cafés, interdire les climatiseurs en-dessous quand il fait moins de 25°C, interdire la publicité pour les grosses voitures neuves polluantes, réduire drastiquement le gaspillage dans la restauration collective, allonger la date de péremption d’une liste de produits alimentaires, mais aussi généraliser la consigne du verre, ou encore rendre obligatoire le recyclage de tous les plastiques en 2023. Voilà qui tombe sous le sens.

Mais retenons aussi quelques idées qui touchent au porte-monnaie, dérangeantes donc courageuses. Taxer à 4% les dividendes des grandes entreprises, afin de financer la transition écologique. Mettre en place un « Impôt Écologique sur la Fortune ». Alourdir l’éco-contribution kilométrique du transport aérien, tout en baissant à 5,5% la TVA sur les billets de train. Exproprier les propriétaires de friches délaissées depuis plus de dix ans, afin de sacraliser ces terres et empêcher leur imperméabilisation. Mais aussi surveiller d’extrêmement près la grande distribution, en faisant siéger la DGCCRF dans les négociations tarifaires avec les producteurs alimentaires, ou en interdisant les labels privés souvent trompeurs, du type « Élu meilleur produit de l’année » ou « Plus vert que moi tu meurs ». Nul doute que beaucoup freineront des quatre fers. Nous verrons qui résiste aux pressions.

Succès politique enfin, peut-être, pour Emmanuel Macron, lui qui avait jusque-là bien malmené les engagements climatiques de la France nés de la COP21. Au lendemain des Gilets Jaunes, c’est lui qui a souhaité installer cette Convention Citoyenne et qui lui a demandé de travailler « dans un esprit de justice sociale ». Difficile de lui reprocher quelconque aveuglement ou surdité face aux enjeux écologiques. Pour peu, toutefois, qu’il passe à l’acte à l’issue des travaux de la Convention Citoyenne.

L’acte le plus fort serait assurément l’adoption d’une loi qui pénalise le crime d’écocide, comme le demande notre assemblée tirée au sort. Quoi ? Modifier l’article 1 de notre Constitution, pour envoyer en prison ceux qui détruisent intentionnellement et massivement l’environnement ? Voilà bien une « révolution juridique » qui viendrait faire de la France une véritable « République écologique », se félicite prudemment l’association Notre Affaire À Tous. Mais nous jugerons aux actes. Voyons quelles propositions, parmi les 149, seront mises en œuvre par ce gouvernement. Ou par le gouvernement suivant, qui pourrait être annoncé après le 2e tour des élections municipales, qui aura lieu dimanche prochain.

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