Peu de nouvelles décisions, peu de perspectives, beaucoup d’incohérences : la 4ème Conférence Environnementale sur le Développement Durable des 25 et 26 avril derniers débouche à nouveau sur une déception.
Associations, entreprises, syndicats et élus s’étaient retrouvés pour aborder l’agenda des solutions pour la croissance verte, l’implication de tous dans la transition écologique et la préservation des milieux. On a parlé d’obligations vertes, de prix du carbone, du nucléaire… Vaste programme pour « le gouvernement sans doute le plus écologiste qui ait jamais existé ». Peut-être trop vaste.
Car, au final, pas de réelles avancées, rien de véritablement engageant ni de contraignant, peu ou pas de sanctions. Comme pour la COP21, les parties prenantes ressentent une volonté d’agir dans l’urgence… sans trop se presser.
Il est vrai que l’exigence environnementale nous met au pied du mur : il s’agit de réussir à muter en moins de dix ans d’un mode de vie et de production anti-écologique vers une société sobre en carbone. Il faut donc avoir le courage de mettre en place un ensemble d’outils dissuasifs ou incitatifs, qui risquent d’être impopulaires. Si les projets de loi et les promesses vont par conséquent dans le sens de la protection de l’environnement sur le papier, la tentation est grande de refiler les dossiers au prochain gouvernement !
Prenons deux exemples. Le premier concerne la feuille de route de la transition énergétique, via la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE). Belle initiative. Mais la présentation de cette première PPE est sans cesse reportée et la répartition envisagée entre énergies renouvelables, nucléaire et efficacité énergétique reste dans le flou le plus total. Une chose est sûre cependant : l’objectif de réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique français de 75% à 50% d’ici 2025. Pourtant, aucun arbitrage sur les réacteurs à fermer ne sera rendu avant 2019. L’engagement de François Hollande de réduire la part du nucléaire sera donc… de la responsabilité de son successeur.
Deuxième exemple avec le prix du carbone, une solution efficace pour introduire un avantage compétitif aux énergies non fossiles. Ainsi, pour lutter contre les émissions de GES et encourager l’utilisation du gaz naturel, l’idée défendue est de surtaxer l’électricité produite dans les centrales à charbon. La valeur de la tonne de CO2 étant d’environ 5 à 6 euros sur le marché, la France souhaite augmenter ce prix et fixer un plancher à 30 euros par tonne de CO2 à partir de 2017. Le charbon étant en ce moment plus rentable que le gaz, instaurer ce plancher permettrait d’inverser la tendance et de limiter les émissions GES. Selon Manuel Valls, 12 millions de TéqCO2 pourraient être économisées.
Cependant, plusieurs problèmes se posent. D’abord, la perte de rentabilité du charbon dans le mix énergétique va bénéficier au nucléaire, dont la France sortira encore plus dépendante. Sans parler des problèmes de sécurité et de stockage des déchets radioactifs. Ensuite, l’absence de coordination européenne sur le prix carbone pourrait inciter la France à acheter en Allemagne cette même énergie issue du charbon.
Enfin, de prime abord, le plancher carbone n’incite pas à investir dans les énergies renouvelables : s’il reste trop bas, le prix du carbone nuit à la rentabilité des investissements dans les projets bas-carbone et donc au changement de comportement. Bref, beaucoup doit encore être précisé dans ce dispositif à mettre en œuvre en 2017. La dernière conférence environnementale de François Hollande laisse donc un goût d’inachevé.
Les scientifiques estiment qu’il nous reste 8 ans maximum pour agir, si nous voulons garder le cap des 1,5°C de réchauffement maximum. Au-delà, le dérèglement climatique sera bien plus douloureux. Le calendrier des solutions doit donc être beaucoup plus ambitieux.
Le prochain gouvernement devra donc faire preuve de courage. Il devra inciter les citoyens à changer de mode de production et de consommation d’énergie. Il devra, pour cela, mettre en place un ensemble d’outils incitatifs, ou dissuasifs. Qui risquent fort d’être impopulaires. Mais le courage gouvernemental est devenu une urgence.
Thierry Fornas.